Nous mentionnions dans une précédente lettre d’information le communiqué de presse publié par la Commission de Surveillance du Secteur Financier (CSSF) par lequel elle informait les investisseurs et autres participants de marché de la publication de l'ESMA concernant les ICOs et y exposant les risques liés à celles-ci pour les investisseurs. Ce communiqué de presse de la CSSF ne devait pas être interprété comme une quelconque prise de position concrète de celle-ci sur les ICO au Luxembourg.
Depuis lors, la CSSF a publié le 14 mars 2018 une mise en garde (l'Avertissement) sur les ICOs, dont le contenu est pour le moins contrasté. En effet, après une brève explication sur le mécanisme de fonctionnement des ICOs, la CSSF se contente d'énumérer les conséquences potentielles et le danger y relatif pour les investisseurs.
Or, malgré l'intérêt évident d'avertir le public quant à ce type d'investissement, le contenu de l'Avertissement est, en substance, très similaire à la déclaration de l'ESMA publiée le 16 novembre 2017 sur le même sujet, tel que mentionné ci-dessus. Par conséquent, la question se pose de savoir si cet Avertissement ne manque pas son objectif?
Il appert être d’une importance primordiale que le public reçoive des orientations claires sur le positionnement de la CSSF quant aux ICOs ou du moins sur la méthodologie à suivre pour leur mise en œuvre. Un positionnement clair de la CSSF serait bénéfique pour toutes les parties en cause, y compris les émetteurs et les investisseurs. En effet, d'une part, les émetteurs seraient en mesure de travailler en parfaite connaissance de cause et donc de structurer leur ICO conformément aux recommandations/directives énoncées et, d'autre part, les investisseurs seraient mis en situation d'évaluer soigneusement les ICOs dans lesquelles investir avec un certain gage de qualité et de protection ; inversement, les investisseurs rejetteraient automatiquement celles qui ne répondraient pas aux recommandations/directives de la CSSF. En fin de compte, c'est l'ensemble du marché qui en bénéficierait.
Malheureusement, la CSSF ne prend pas position et ne donne aucune recommandation/directive auxquelles se conformer a minima. Certes, la CSSF n'interdit pas les ICOs et reconnaît l'absence de toute réglementation y applicable, pour le moment; néanmoins, elle indique clairement dans sa mise en garde qu'elle n'hésitera pas à apprécier cette méthode de levée de fonds en étendant son analyse aux objectifs poursuivis afin d'apprécier si elle peut être un moyen de contourner ou d'éviter la réglementation applicable au secteur financier, notamment les dispositions de la loi du 10 juillet 2005 relative aux prospectus pour valeurs mobilières et de la loi du 5 avril 1993 relative au secteur financier.
Certains de nos pays voisins travaillent sans relâche pour prendre l'initiative en matière d'ICO en préparant un cadre juridique visant à les gouverner. Une initiative publique soutenue par le régulateur devrait être lancée rapidement afin d'éviter que le Luxembourg ne perde son rôle de premier plan en tant que Start-up nation et hub pour les Fintechs, les ICOs y étant étroitement liées.
Pour tout complément d'information, veuillez contacter Pierre-Alexandre Degehet.
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