Les deux nouvelles lois du 29 juillet et du 15 août 2023 visant à transposer en droit national la directive 2019/1158 du 20 juin 2019 concernant l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants (les "Lois") ont finalement été publiées au Mémorial. Elles sont entrées en vigueur respectivement en date des 22 et 21 août 2023.
Cette initiative faisait suite à l'observation selon laquelle l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée reste un défi considérable pour de nombreux parents et travailleurs ayant des responsabilités familiales, notamment du fait de la plus grande prévalence d’horaires de travail prolongés et variables qui a des conséquences négatives, plus particulièrement sur l'emploi des femmes. Par conséquent, les femmes ont tendance à être sous-représentées sur le marché du travail. Partant de ce constat, l'objectif des Lois est triple :
- l'extension du droit au congé paternité ;
- l’adaptation du droit au congé parental ;
- l'introduction de la possibilité pour les parents et aidants de demander des formules souples de travail afin de s'adapter à leur rythme de travail et de rester sur le marché de l'emploi.
Les Lois introduisent également deux nouveaux congés extraordinaires.
Extension du champ d'application du droit au congé paternité
Avant l'entrée en vigueur des Lois, le Code du travail luxembourgeois prévoyait le droit à un congé extraordinaire de 10 jours pour le père en cas de naissance d'un enfant. Les Lois étendent le droit au congé paternité aux seconds parents équivalents reconnus comme tels par le droit national. La modification vise à prendre en compte la situation des couples de même sexe, en permettant aux personnes reconnues comme seconds parents équivalents ou coparents de bénéficier du congé paternité en cas de naissance d'un enfant, en dehors de toute procédure d'adoption.
Les jours de congé peuvent être fractionnés pour un salarié à temps plein. Pour les salariés à temps partiel, la durée du congé paternité est calculée au prorata du temps de travail hebdomadaire du salarié. Le congé paternité est par ailleurs limité à un congé par salarié et par enfant, ce qui signifie qu'en cas de naissances multiples, le père ou le second parent équivalent a droit à un congé pour chaque enfant.
Il convient de mentionner qu'avant l'entrée en vigueur des Lois, le Code du travail prévoyait que l'employeur devait être informé des dates prévues du congé paternité avec un préavis de deux mois. Si le préavis de deux mois n'était pas respecté, le congé paternité pouvait être réduit à deux jours à la discrétion de l'employeur. À cet égard, Les Lois introduisent les nouveautés suivantes :
- Afin de ne pas porter préjudice aux salariés confrontés à la naissance prématurée d'un enfant (et qui ne peuvent respecter le délai de préavis de deux mois), le délai de préavis de deux mois ne s'applique pas si la naissance a lieu deux mois avant la date prévue.
- La possibilité pour l'employeur de réduire le congé de paternité à deux jours en cas de non-respect du délai de préavis de deux mois est par ailleurs supprimée. Dans ce cas, le congé doit être pris en une seule fois et immédiatement après la naissance de l'enfant, à moins que l'employeur et le salarié ne conviennent d'une solution flexible, permettant au salarié de prendre le congé en tout ou en partie à une date ultérieure.
Les Lois étendent enfin le droit au congé paternité aux travailleurs indépendants, à condition qu'ils puissent justifier d’une assurance obligatoire à la Caisse nationale d’assurance pension depuis au moins six mois.
Ces nouvelles dispositions s'appliqueront aux congés paternité pris pour un enfant né après leur entrée en vigueur, c'est-à-dire après le 22 août 2023.
Adaptation du droit au congé parental
Les Lois apportent les modifications suivantes au Code du travail en ce qui concerne le congé parental :
- En ce qui concerne les demandes de premier congé parental fractionné, la décision de l'employeur refusant une telle demande doit être motivée par écrit.
- En ce qui concerne la possibilité pour l'employeur de reporter un deuxième congé parental à temps plein demandé par un parent, la décision de report doit également être notifiée par écrit. Avant toute décision de report du deuxième congé parental, l'employeur doit proposer au salarié, dans la mesure du possible, des modalités flexibles de prise du congé parental (c'est-à-dire un congé parental fractionné ou un congé parental à temps partiel).
Possibilité pour les parents de demander des formules souples de travail
Avant l'entrée en vigueur des deux Lois, la seule disposition du Code du travail qui permettait à un parent de demander un aménagement de ses horaires de travail était l'article L.234-47 (11). Cet article s'applique aux salariés qui reprennent le travail à l'issue d'un congé parental, et leur permet de solliciter un entretien avec leur employeur afin de demander un aménagement de leurs horaires de travail, pour une période maximale d'un an.
Les Lois prévoient désormais également la possibilité pour tout salarié ayant au moins six mois de service continu de demander un entretien avec son employeur afin de solliciter l'introduction de formules souples de travail. Les salariés concernés sont :
- les parents d'un enfant de moins de neuf ans, ou
- ceux qui fournissent des soins personnels ou une aide personnelle à un membre de famille (fils, fille, mère, père, conjoint ou partenaire) ou à une personne vivant dans le même ménage et qui nécessite des soins ou une aide considérables pour raison médicale grave.
Les formules souples de travail peuvent correspondre, par exemple, au télétravail, aux horaires de travail flexibles ou à la réduction du temps de travail. Les mesures ne peuvent excéder un an. L'employeur doit fournir une réponse au salarié dans un délai d'un mois, en tenant compte des besoins des deux parties. Toute décision de refus ou de report doit être motivée par écrit, par lettre recommandée avec accusé de réception.
Le salarié a le droit de revenir au régime de travail initial à la fin de la période convenue entre les parties, ou avant la fin de cette période, en cas de changement de circonstances. Dans ce dernier cas, l'employeur doit fournir une réponse à l'employé dans un délai d'un mois.
Une amende de 251 à 2.500 euros est prévue pour les employeurs qui ne respectent pas les exigences susmentionnées.
Nouveaux congés extraordinaires
Les Lois introduisent deux nouveaux congés extraordinaires :
- un congé d'un jour sur une période d’occupation de douze mois pour raisons de force majeure liée à des raisons familiales urgentes en cas de maladie ou d'accident rendant indispensable la présence immédiate du salarié ;
- un congé de cinq jours sur une période d’occupation de douze mois pour fournir des soins personnels ou une aide personnelle à un membre de famille (fils, fille, mère, père, conjoint ou partenaire) ou à une personne vivant dans le même ménage, qui nécessite des soins ou une aide considérables pour raison médicale grave. L'état de santé de la personne concernée doit être attesté par un médecin.
La durée des deux congés extraordinaires est fractionnable pour un salarié travaillant à temps plein, et calculée au prorata du temps de travail hebdomadaire pour les travailleurs à temps partiel.
La moitié des salaires versés par l'employeur à l'employé pendant ces congés extraordinaires sera prise en charge par le budget de l'État, jusqu'à cinq fois le salaire social minimum pour travailleurs non qualifiés (soit 12.541,20 euros à l'indice 921,40), à condition que l'employeur introduise une demande en ligne dans un délai de six mois.
Protection contre le licenciement et les représailles
L'employeur n'a pas le droit de résilier le contrat de travail d'un salarié au motif que celui-ci a demandé ou a bénéficié d'un congé extraordinaire ou de formules souples de travail. Un tel licenciement est nul et non avenu.
En outre, un salarié ne peut faire l'objet de représailles ou d'un traitement moins favorable pour avoir bénéficié ou demandé à bénéficier d'un congé extraordinaire ou de formules souples de travail. L'employeur devra également conserver l’emploi du salarié, ou au moins un emploi similaire, pendant toute la durée du congé extraordinaire et/ou des formules souples de travail.
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